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Les achards aux algues de Marie-Aimée

Marie-Aimée est une ancienne pêcheuse d’ourites. Cette activité, largement pratiquée par les femmes rodriguaises, a chuté depuis quelques années, les pieuvres se faisant plus rares. Beaucoup d’entre elles se sont alors reconverties dans la confection artisanale d’achards, un héritage des traditions de leurs grands-mères. Pour rester en contact avec la mer, l’ancienne pêcheuse s’est spécialisée dans l’achard d’algues. Hello Rodrigues l’a suivie.

Textes et photos: Florence Guillemain

Un bienfait de la mer

Depuis déjà plusieurs années, Marie-Aimée Agathe, accompagnée d’une de ses filles, Stéphanie, se passionne pour une algue de la famille de la salicorne. C’est en bus que les deux femmes arrivent à Grand-Baie avec leurs sceaux et leur pique-nique. Un joli chapeau de paille vissé sur la tête, vêtues de vieux T-shirts, d’un legging et chaussées de baskets, elles s’enfoncent dans la mer à mi-genou pour «tirer les algues», comme elles disent. Il suffit de se baisser pour cueillir les grappes d’algues et les jeter dans des sceaux.

Marie-Aimée est la seule sur l’île à réaliser cet achard de «gaumon corne». La gracilaria salicornia est le nom scientifique qu’on lui donne. Elle est dotée de vertus médicinales, permettant, entre autres, d’atténuer l’hypertension, de faciliter la digestion et d’agir comme un antioxydant. Elle est également riche en vitamine A. En Europe, la salicorne est utilisée dans certains plats avec un goût qui rappelle celui du cornichon. Comme cette petite algue fine se cueille dans l’eau à mi- marée, les pêcheuses doivent donc composer avec les flux et reflux de la mer.

Quelques heures suffisent à la récolte. Après une brève pause sur les rochers pour casser la croûte, elles ramènent leur cueillette qui varie entre 10 et 20 kilos à chaque sortie. Ces jours-là, elles louent un véhicule pour pouvoir les transporter jusque chez elle à Lataniers. «J’ai des clients fidèles qui adorent cet achard. Je vends mes pots au marché de Port-Mathurin avec Stéphanie», annonce Marie-Aimée dans un sourire généreux. 

Une préparation compliquée

Chez elle, un.e atelier/cuisine est spécialement aménagé.e pour toutes ses préparations. Marie-Aimée a suivi une formation en 2002 pour acquérir la base des normes d’hygiène européennes. Gants, blouse, foulard sur la tête… Elle stérilise les pots et s’affaire avec sa fille à cuisiner ses préparations qui finiront en pot.

Sur place, elle prend soin de bien nettoyer les algues en les passant trois fois à l’eau douce, puis il faut défaire les branches une par une pour voir s’il n’y a pas un petit coquillage, un crabe ou un petit morceau de corail collé. «Je me sens parfois restreinte dans ma production à cause des problèmes d’eau sur l’île. Le nettoyage de cette algue demande beaucoup d’eau», se lamente la cuisinière.

Ensuite, il faut laisser tremper l’algue, légèrement orangée, dans la saumure pendant une nuit (sel et vinaigre) afin de la conserver, puis de la faire bouillir. Et enfin, la faire sécher. «Ce n’est qu’après toutes ces étapes que je peux enfin commencer à faire l’achard. D’autres femmes ont essayé et ont abandonné car c’est trop contraignant», avoue-t-elle. 

Pour réaliser sa recette, Marie-Aimée coupe du piment séché qu’elle fait revenir dans une marmite d’huile avec de l’ail écrasé. Elle y ajoute du curcuma en poudre, puis ses algues et finit par incorporer des piments verts frais cueillis dans son jardin. Alors, prêt à tester ? Retrouvez Marie-Aimée au marché de Port-Mathurin, après le pont, à gauche, au plus près du marchand de fruits.

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