Du 8 au 11 mai 2025, Rodrigues vibrera au rythme de sa 4e édition des Jeux, un rendez-vous sportif d’envergure qui marquera aussi une première historique : celle du tout premier grand événement accueilli par le Stade Jean Daniel André. Anciennement connu sous le nom de Stade de Camp du Roi, l’enceinte porte officiellement, depuis le 30 septembre 2024, le nom de l’un des plus grands athlètes que Rodrigues ait connus. Cette édition prend ainsi une dimension toute particulière : au-delà de la performance, elle s’inscrit dans la mémoire d’un homme dont le parcours sportif et humain a laissé une empreinte profonde sur l’île. Deux ans après sa disparition, l’héritage de Jean Daniel André sera plus vivant que jamais. A l’approche des Jeux, son épouse Idéa François-André nous livre un vibrant témoignage sur l’héritage que ce monument du sport local a laissé derrière lui.
Trois ans après la disparition de Jean Daniel André, figure emblématique du sport à Rodrigues, son épouse Idéa François-André prend pour la première fois la parole, livrant un témoignage rare et profondément émouvant sur l’homme, l’entraîneur et le pilier qu’il a été. « C’est avec un mélange d’émotions que je prends la parole aujourd’hui. La tristesse d’avoir perdu mon mari trop tôt ne m’abandonne pas, mais elle se mêle à une immense fierté et une profonde gratitude. Jean Daniel André nous a quittés, mais il continue de vivre à travers l’impact qu’il a eu sur Rodrigues — dans le cœur de ceux qu’il a entraînés, dans les valeurs qu’il a transmises, et désormais dans ce stade qui porte fièrement son nom », explique-t-elle la voix remplie d’émotion.
Le 20 septembre 2024, voir le stade renommé en son honneur a été un moment très émouvant pour elle. « Ce geste symbolique m’a profondément touchée. Daniel était un sportif passionné, mais il était bien plus que cela. Il était un pilier de notre communauté, un homme généreux, entièrement dévoué à ses engagements. Il a donné de son temps et de son énergie sans jamais compter, encadrant des jeunes avec une bienveillance et une rigueur exemplaire », confie la mère de famille.
Le prochain concours des Jeux de Rodrigues marquera une première : ce sera le tout premier événement d’envergure organisé dans ce stade rebaptisé. « Rien que d’y penser, je ressens déjà cette effervescence, cette énergie qui va animer le lieu. Ce sera un moment fort, où les athlètes qu’il a lui-même entraînés viendront concourir. Ce sera aussi un moment de célébration : celui de l’héritage sportif et humain que Daniel nous a laissé. Ce changement de nom est une reconnaissance de l’impact immense qu’il a eu sur le sport à Rodrigues. Je suis profondément émue par l’élan d’amour et de respect que cela représente. Ce n’est pas juste un nom sur un mur, c’est une mémoire vivante. C’est une façon de dire que Daniel André a marqué les esprits et les cœurs de manière durable. »
Très émue, elle remercie les autorités locales qui ont rendu hommage à son époux au travers de ce changement de nom du stade. « Je tiens à remercier tous ceux qui ont œuvré pour que ce stade porte désormais son nom. Pour moi, pour nos deux fils, pour toute notre famille, sa maman, ses frères et ses sœurs, cela a une valeur inestimable. Ce lieu devient un symbole fort, un phare pour les générations futures. Je ressens un pincement au cœur de savoir qu’il ne verra pas de ses yeux les fruits de son travail, ni ses athlètes en action. Mais je me console en voyant combien il a semé, et à quel point cela continue de fleurir. Lors des compétitions, au-delà des performances, je verrai les gestes, les techniques, les valeurs que Daniel a transmis avec passion. Ce sera bouleversant, mais aussi apaisant. C’est la reconnaissance de son travail acharné, et pour moi, c’est un vrai réconfort, une forme de paix intérieure. »
Les Jeux de Rodrigues doivent raviver la flamme du sport sur notre île, dit-elle. « Et je sais que s’il était encore parmi nous, Daniel aurait fait partie de l’organisation, avec son enthousiasme habituel. Ces jeux seront une renaissance, une continuité de ce qu’il a bâti. »
Aujourd’hui, elle voit cette même passion chez leurs deux fils, Olivier et Ory. « Ils ont grandi dans un environnement bercé par le sport. Dès leur plus jeune âge, ils ont été encouragés à se dépasser, à s’épanouir par l’effort. Le sport, pour eux, est devenu un mode de vie. Ory, notre cadet, excelle en sprint, comme son père. Il poursuit un diplôme en sciences du sport, avec pour ambition de devenir le tout premier scientifique sportif de Rodrigues. Il veut apporter des innovations, faire avancer notre île avec des connaissances nouvelles. Il suit les traces de son père tout en traçant sa propre voie. Olivier, l’aîné, est le premier physiothérapeute sportif de Rodrigues. Il accompagne déjà des équipes locales, et travaille actuellement avec le Orange Volleyball Club de Rodrigues qui participe à une compétition en Libye. Il se fait un nom dans la médecine du sport et pratique aussi l’haltérophilie. Chacun, à sa manière, contribue à faire progresser le sport sur notre île. Je suis incroyablement fière d’eux, de leur engagement, de leurs ambitions. Ils incarnent, à leur façon, l’héritage vivant de leur père. Daniel n’est plus là physiquement, mais il est partout autour de nous : dans le souffle des athlètes, dans les pas des coureurs, dans la ferveur des compétitions. Et à travers nos fils, son feu continue de brûler.»
Une figure emblématique du sport rodriguais
Jean Daniel André a su, très tôt, se faire une place dans un paysage sportif pourtant peu doté en infrastructures dans les années 70 et 80. Passionné par le sport sous toutes ses formes, il s’est illustré dans des disciplines variées, comme le judo, le football, mais surtout l’athlétisme, sa grande passion. À l’âge de 16 ans, il quitte Rodrigues pour Maurice afin de poursuivre ses études tout en poursuivant son rêve de devenir un athlète de haut niveau.
Entre 1984 et 1987, il est détenteur du record national du 400 m (47’7). Ce palmarès ne sera que le début d’une aventure remarquable. En 1984, il entre dans l’histoire en devenant le premier Mauricien à participer à une discipline des Jeux Olympiques, à Los Angeles, dans une délégation de quatre athlètes. Il est alors le plus jeune du groupe. L’année suivante, en 1985, il marque une nouvelle étape : premier Rodriguais à participer aux Jeux des îles de l’océan Indien. La même année, il est décoré par la Reine Elizabeth II, une reconnaissance rare et précieuse.
Un mentor pour la jeunesse
Mais Jean Daniel André n’était pas qu’un athlète hors pair. Il a également été un formateur, un mentor, un bâtisseur. En tant que Youth Officer, il a accompagné de nombreux jeunes à travers l’île, insufflant confiance, discipline et persévérance. Il a également été entraîneur et instructeur pour l’IAAF (International Amateur Athletic Federation), formant à son tour des générations d’athlètes. En 2003, il est fait « Honorary Freeman of Rodrigues » par l’Assemblée Régionale. En 2012, il est décoré par l’IAAF. En 2015, il reçoit la distinction de MSK (Member of the Star and Key of the Indian Ocean), l’une des plus hautes distinctions de la République de Maurice.
Un homme de cœur avant tout
Au-delà des exploits, ce qui restera de Jean Daniel André, c’est l’homme. Humble, généreux, profondément humain. Ceux qui l’ont côtoyé se souviennent de son écoute, de sa disponibilité, de ses gestes simples mais puissants.
Un hommage durable
Le Stade Jean Daniel André devient aujourd’hui un lieu de mémoire vivante, un symbole de résilience et d’inspiration. Lors de son inauguration, le Chef Commissaire Franceau Aubret Grandcourt a proposé la création d’un Mur de Reconnaissance pour honorer les grands sportifs rodriguais. Un projet qui s’inscrit dans la continuité de la vision portée par Daniel André lui-même : celle d’un sport vecteur de valeurs, d’unité et de dépassement de soi. À l’approche de la 4e édition des Jeux de Rodrigues, cet hommage prend tout son sens.
