Le samedi 24 août 2024 marquera une date importante dans l’histoire de la communauté chagossienne. Un monument dédié à la mémoire des Chagossiens déportés a été inauguré lors d’une cérémonie émouvante à Rodrigues, en présence de plusieurs personnalités de premier plan. Parmi les dignitaires présents figuraient le Chef Commissaire, Franceau Grandcourt, G.O.S.K., l’Adjoint au Chef Commissaire, Johnson Roussety, G.O.S.K., le Président de l’Assemblée Régionale, Christian Léopold, G.O.S.K., le Commissaire de la Culture, Varok Ravina, et le Président du Chagossian Welfare Fund, Olivier Bancoult, G.C.S.K. Cette commémoration souligne l’importance de la mémoire collective et la reconnaissance des épreuves traversées par la communauté chagossienne.
Textes: La Rédaction/Photos: ARR
Une histoire de souffrance et de résilience
L’inauguration de ce monument à Rodrigues vient rappeler une période sombre de l’histoire moderne : la déportation des Chagossiens. Entre 1965 et 1973, les habitants de l’archipel des Chagos, un groupe d’îles dans l’océan Indien, ont été contraints de quitter leurs terres ancestrales. Cette déportation s’inscrit dans un contexte lié à l’indépendance de Maurice. Parmi les tragédies survenues lors de ce déplacement forcé, deux Chagossiens, M. Laurent Ernest et Mme Roseline Médor, ont perdu la vie en mer lors de leur transfert vers Maurice en 1967 et 1968. Ils ont été inhumés à Rodrigues, où ils reposent aujourd’hui au cimetière d’Anse aux Anglais. Le monument récemment dévoilé rend un hommage particulier à ces deux victimes, tout en symbolisant la souffrance et la résilience de toute la communauté chagossienne.
En effet, en 1965, alors que Maurice se préparait à obtenir son indépendance, le gouvernement britannique a exigé la séparation de l’archipel des Chagos du territoire mauricien comme condition pour accéder à cette indépendance. En échange, le Royaume-Uni a garanti à Maurice une compensation financière et l’assurance de l’indépendance en 1968. Ce compromis, imposé par les puissances coloniales, a eu des conséquences dévastatrices pour la communauté chagossienne.
Les Chagossiens, qui vivaient en harmonie sur leurs îles depuis des générations, ont été brusquement arrachés à leur mode de vie. Dépossédés de leurs maisons, de leurs terres et de leur identité, ils ont été transportés par bateau vers Maurice et les Seychelles, souvent dans des conditions inhumaines. Pour de nombreuses familles, cette déportation a marqué le début d’une vie d’incertitudes, de pauvreté et de lutte pour la reconnaissance de leurs droits.
Une reconnaissance officielle
Le dévoilement de ce monument s’inscrit dans une démarche de reconnaissance officielle des souffrances endurées par les Chagossiens. Le Chagossian Welfare Fund, qui a joué un rôle clé dans cette initiative, a également annoncé que le 3 novembre sera désormais consacré à la Journée de Commémoration de la déportation de la communauté chagossienne. Cette date sera un moment de recueillement et de réflexion sur l’histoire et les luttes de cette communauté.
Aujourd’hui, environ huit familles de la communauté chagossienne vivent encore à Rodrigues. Bien que leur nombre soit restreint, leur présence continue à témoigner de la persistance d’une identité chagossienne forte malgré les décennies de dispersion et de lutte pour la justice.
Le monument inauguré à Rodrigues est bien plus qu’une simple structure commémorative. Il incarne la mémoire collective d’un peuple déporté, la reconnaissance des injustices subies et la persévérance d’une lutte qui se poursuit encore aujourd’hui. Chaque année, lors de la Journée de Commémoration de la déportation de la communauté chagossienne, ce monument sera un rappel poignant de la résilience et de la dignité de ceux qui continuent de se battre pour retrouver leur terre natale.
Cette initiative marque une étape importante dans la reconnaissance officielle des souffrances des Chagossiens et témoigne de l’engagement des autorités rodriguaises et de la communauté chagossienne à préserver cette mémoire pour les générations futures. Le monument, est destiné à devenir un lieu de recueillement et de mémoire, non seulement pour les Chagossiens, mais pour tous ceux qui se soucient de la justice et des droits humains.